Entretien d'un médecin d'un service PSE
Comment ça se passe au travail pour le moment dans ce contexte de confinement ?
C'est très calme actuellement au travail, il est consacré essentiellement à du travail administratif et à essayer de maintenir les contacts avec nos partenaires habituels et suivre les situations difficiles connues dans les écoles.
Est-ce que vous pourriez me décrire votre activité professionnelle générale ?
Je suis médecin scolaire et je gère deux implantations. Dans un centre un peu plus de 6000 élèves et dans l'autre 3700. Pour des écoles fondamentales et secondaires.
D'habitude les journées sont consacrées essentiellement aux bilans de santé, donc les visites médicales des enfants des écoles et pas mal de réunions au sujet de problèmes vécus par ces enfants ou alors pour préparer la promotion de la santé, les animations sur différents sujets comme l'hygiène des dents, etc.
De quelle manière avez-vous adapté votre travail avec vos collègues ?
Il y a eu une diminution drastique de ce type d'activité. Plus d'animations, plus de bilans de santé, forte diminution des contacts avec les partenaires mais on essaie de les maintenir par téléphone. On utilise le temps perdu à faire du travail administratif, à tenir nos dossiers en ordre, à faire du rangement, éventuellement à suivre l'une ou l'autre conférence en ligne.
Est-ce que cette nouvelle manière de travailler vous pose des questions ?
L'essentiel de notre travail tourne autour des dossiers médicaux, c'est quelque chose qui pendant la période de confinement est difficile à réaliser parce que les dossiers ne peuvent pas sortir du centre pour des questions de secret professionnel et de confidentialité, RGPD. Nous avons mis en place une permanence, un tour de rôle avec les agents du centre pour essayer de maintenir les dossiers en état.
Donc tu dirais que c'est une des difficultés majeures, est-ce qu'il y en a d'autres qui sont présentes à cause du confinement ?
Le télétravail est la difficulté majeure. L'autre difficulté importante c'est le suivi de nos familles en difficulté soit en précarité, soit en situation de maltraitance parce que tout est très fortement ralenti au niveau de toutes les structures sociales d'aide, de la justice et ce sont des familles qui sont souvent difficiles à contacter.
Comment envisagez-vous votre travail dans les semaines qui suivent ?
Pour les 4 semaines à venir, c'est la poursuite de ce type de travail avec en tête, en arrière fond, la préparation d'une éventuelle reprise. Pour la suite, l'ONE nous a donné des consignes strictes par rapport au programme de vaccinations et donc on va tout faire pour essayer d'assurer les vaccinations des enfants au mieux de nos possibilités. Et ce sera la tâche prioritaire.
De quelles ressources auriez-vous besoin actuellement ?
Des ressources sur le plan matériel, moi j'aurais besoin d'un GSM professionnel et d'un ordinateur professionnel et effectivement peut-être d'avoir une formation à tous les outils comme les vidéoconférences etc. Parce que pour le moment c'est le règne de la débrouille. Pour le reste quand, on ne peut pas venir au centre, le travail est vraiment très limité donc voilà c'est difficile de donner d'autres besoins. Des besoins pour reprendre, ça il y en a c'est clair.
Voyez-vous des aspects positifs, des opportunités à la situation ?
Alors les aspects positifs en tout cas pour moi, c'est la possibilité de travailler dans le calme et de ne pas être tout le temps interrompue. Donc de pouvoir entamer éventuellement un travail de fond et le mener à son terme ce qui est difficile quand on est au centre parce qu'on est tout le temps interrompue. Une autre possibilité, c'est peut-être d'avoir une vue globale du travail, on essaie de mettre de l'ordre, on fait des rangements, on découvre des choses et puis on apprend, on apprend les vidéoconférences, on apprend de nouvelles technologies. Ce matin j'ai fait une déclaration sur Betterstreet pour un problème au niveau du centre. J’apprends plein de choses.
Y a-t-il des ressources que vous voudriez partager ?
La vidéoconférence oui ça c'est clair, j'aimerais bien pouvoir le partager avec d'autres professionnels. Maintenant je pense, qu'il y en a qui sont bien plus au fait que moi avec toutes ces nouvelles méthodes. Effectivement partager ça avec les agents, oui essayer d'apprendre à travailler comme ça. Pourquoi pas ?
Connaissez-vous des initiatives citoyennes ? Ou des ressources dans le monde professionnel qui pourrait justement soutenir des familles en difficulté ?
Non. On n'a pas ça mis sur pied, on n'a pas cherché à le faire. On essaie de rester en contact, de maintenir le contact avec les familles essentiellement par le biais du téléphone. Je sais que les assistantes sociales prennent des contacts réguliers. Elles échangent avec les équipes PMS et même avec les autres équipes avec lesquelles on a l'habitude de travailler. Sinon sur le plan citoyen nous avons proposé notre aide à l'ONE pour les consultations des nourrissons. Certains médecins ont proposé leur aide pour les postes médicaux de garde, certaines AS ont été sollicitées pour faire de la garderie d'enfants.
Auriez-vous une demande à formuler pour votre secteur d'activité ou au-delà par rapport à la situation confinement ?
Ca serait d'avoir un équipement adéquat, adapté sur le plan informatique. Parce que les ordinateurs dont on dispose n'ont pas de caméra et certains n'ont pas de haut-parleurs. Donc voilà certaines choses sont impossibles. Avoir ça pour commencer.
Il y a aussi l’entretien, l'hygiène du centre de santé. Il faudrait qu'il soit bien plus performant qu'il ne l’est actuellement parce qu'on manque cruellement de personnel d'entretien. Je pense que l'hygiène restera une préoccupation qui sera importante pour tout monde, même à la fin du confinement. C'est quelque chose qui nous aura marqué, et donc les gens pourront devenir de plus en plus exigeants sur ce plan là. Ils ont raison d'ailleurs.
Est-ce que vous imaginez déjà un après ?
On essaye de l'anticiper, on a relevé toutes les tâches qui nous restaient à faire et on a déjà effectué une priorisation de ces tâches et donc l'après va se construire progressivement et dépendra aussi beaucoup de la date à laquelle on nous permettra de recommencer à travailler quasi normalement. En ce qui concerne le cas particulier de la vie scolaire, ça va aussi dépendre de la prolongation de l'activité scolaire au-delà du 1er juillet. Est-ce que quelque chose va se faire à ce niveau là ou pas ? Ça va jouer énormément pour nous dans la possibilité de réaliser nos tâches.
Je vous remercie beaucoup avoir pris le temps de répondre à mes questions.
Merci, c'était agréable.
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